Le deal UE-Maroc nul en géographie
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Double et amère ironie. Un projet d'accord sur les mesures de protection pour des produits liés à des emplacements géographiques spécifiques ne connaît manifestement pas l'étendue géographique du Maroc.
Publié 11 décembre 2015


Le Parlement européen examine actuellement un projet d'accord négocié entre la Commission européenne et le Maroc, sur les indications géographiques (IG).

Une indication géographique est un signe distinctif utilisé pour identifier un produit comme étant originaire d'un pays, région ou localité particulière où sa qualité, la réputation ou d'autres caractéristiques sont liées à son origine géographique.

Des exemples célèbres sont le champagne, le cognac, le fromage parmigian, le thé Darjeeling, etc. Le Champagne ne peut être appelé champagne s'il vient de la région Champagne en France. Des noms non géographiques peuvent être protégées s'ils sont liées à un lieu particulier; par exemple. la Feta n'est pas nommé d'après un endroit, mais est si étroitement liée à la Grèce qu'il est identifié comme un produit grec.

En tant que tel, les IG sont une mesure de protection de la valeur économique et culturelle, pour éviter les abus et la contrefaçon.

L'accord proposé offrirait une protection à environ 3200 produits de l'UE, contre 28 produits marocains; 14 vins et 14 produits agricoles. À l'heure actuelle, la liste des produits couverts par l'accord proposé ne semble pas contenir de produits qui viennent du Sahara Occidental. Le texte proposé, y compris la liste des IG enregistrées, est ici.

Cependant, la liste telle que présentée par la Commission européenne date du 9 janvier 2013. Certaines indications géographiques enregistrées depuis ne sont pas dans la liste. Maroc pourrait avoir enregistré des produits originaires du Sahara Occidental comme IG selon sa législation nationale. En outre, si l'accord était adopté, il serait possible pour le Maroc d'enregistrer les produits du Sahara Occidental comme éligibles aux IG dans l'avenir. Cet enregistrement serait une affaire marocaine exclusivement, ne nécessitant pas l'approbation de l'UE. L'objectif de ces mesures est d'offrir une protection directe aux indications géographiques enregistrées par les parties sur la base de leur propre législation.

Comme l'ancienne Haut Représentant de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, l'a déclaré en juin 2011 : "Le Maroc pourrait enregistrer comme indications géographiques des produits originaires du Sahara Occidental s'ils répondent aux critères fixés par sa législation dans ce domaine".

Western Sahara Resource Watch estime que l'UE est en train de perdre toute crédibilité en terme de respect du droit international.

"C'est une terrible ironie que l'UE dans un accord spécifique sur les indications géographiques ne parvienne pas à définir le pays partenaire avec lequel elle fait affaire. Aucun État au monde ne reconnaît la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental. C'est un territoire distinct, un territoire non autonome, en attente dans processus de décolonisation mené par l'ONU", a déclaré Sara Eyckmans, coordinatrice de Western Sahara Resource Watch.

WSRW énonce qu'il devrait exister une exigence de base indiquant que les produits du Sahara Occidental ne peuvent pas bénéficier de la protection des IG au titre de cet accord avec le Maroc.

L'accord sur le IG a été ratifié à Berlin le 16 janvier 2015 par le commissaire européen à l'Agriculture Hogan et le ministre marocain de la Pêche et de l'Agriculture Aziz Ackannouch. Le mandat de négocier les IG avait été donné en 2005, quand la Commission avait reçu un mandat pour négocier la libéralisation du commerce pour l'ALE avec le Maroc. Cela avait été conclu en octobre 2012. Il a fallu cinq rounds de pourparlers entre décembre 2012 et décembre 2014 avant un accord.

Le Parlement Européen devrait approuver l'accord UE-Maroc sur les IG proposé dans les prochains mois.

Le 6 novembre 2015, 40 ans se sont écoulés depuis que le Maroc et la Mauritanie ont envahi le territoire du Sahara Occidental. La Cour Internationale de Justice avait alors conclu qu'il n'y avait aucun lien de souveraineté entre le Sahara Occidental et ses deux États voisins. L'occupation est condamnée par l'ONU, et la moitié du peuple a fui le territoire. L'ONU tente de négocier un règlement au conflit qui respecte le droit légitime du peuple à l'autodétermination. Toutes les autres questions coloniales en Afrique ont été réglées, à l'exception de celle du Sahara Occidental.
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